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Enfant HPI : envisager le saut de classe ?

La détection du Haut Potentiel chez un enfant produit inévitablement les idées préconçues de “surdoué”, “génie”, “intello” et autres qualificatifs qui laissent penser à une facilité pour la scolarité. Plus qu’une réussite garantie, c’est surtout la compatibilité entre l’enfant HPI et l’école qui se pose alors (voir mon article). Des difficultés comme l’ennui, l’agacement ou le refus de faire ses devoirs peuvent alors apparaître. Pour résoudre ces problèmes, faut-il forcément envisager le saut de classe ?

Quels sont les signaux d’alerte ?

Il nous faut distinguer deux types de signaux sévères et invisibles. L’ennui chronique ouvertement déclaré, l’agacement devant les méthodes d’enseignement, de l’agressivité envers l’institution scolaire voire un refus d’école sont des signes sévères et épidermiques d’une dé-synchronisation entre l’enseignement et les capacités de l’enfant HPI. En règle générale, c’est plutôt la voie qu’empruntent les garçons pour faire savoir qu’ils ne sont pas bien à l’école. 

Mais d’autres signaux faibles voire invisibles sont à prendre en compte. Une personnalité vue comme réservée avec d’excellentes notes, des marges de progression régulièrement relevées par l’équipe enseignante et une volonté visible de ne pas se faire remarquer peuvent dénoter également d’un écart de niveau entre le niveau enseigné et les capacités de l’enfant à Haut Potentiel. Ce comportement est plus généralement celui qu’adoptent les filles. Sans vigilance particulière sur le sujet, les effets sur leur scolarité future et/ou l’estime d’elles-mêmes sont presque plus néfastes.

Comment prendre la décision d’un saut de classe ?

La décision d’un saut de classe est naturellement difficile pour les parents. Elle remet en cause le souhait d’une scolarité traditionnelle car elle confirme sans équivoque que l’enfant est particulier dans son fonctionnement cognitif. Je reçois régulièrement des parents qui, après une détection, ont besoin d’accepter que leur enfant ne sera pas “totalement comme les autres”. 

Effectivement, un enfant HPI a très rarement une scolarité sans heurts, au risque alors d’avoir vécu une scolarité très ennuyeuse. Avant d’envisager le saut de classe, il est souvent bénéfique de considérer la possibilité d’une accélération de scolarité. L’enfant assiste alors à certains cours dans le niveau supérieur. C’est un moyen plus aisé à mettre en œuvre du côté de l’école. Il permet également de confirmer que l’enfant se sent mieux avec un enseignement plus avancé. 

émotion enfant épuisé avec la tête dans les bras

Par expérience, il peut également être utile de procéder à des bilans pour étayer la prise de décision. Si ce n’est déjà fait, un bilan de QI (appelé Wisc) confirmera officiellement le Haut Potentiel. Il fournira également des éléments de compréhension sur le fonctionnement cognitif de l’enfant. Ces éléments pourront éclairer les divers aspects de ses capacités scolaires. J’ai pu constater dans mon accompagnement de sauts de classe que la question de l’écrit constituait un sujet mis en avant. 

Si les parents constatent des réticences à l’écrit, je conseille souvent de procéder à un bilan d’orthophonie. Il ne s’agit pas d’envisager automatiquement la présence d’un trouble de l’apprentissage de type “dys”. On s’assurera plutôt que le Haut Potentiel ne masque pas un besoin d’accompagnement comme ça peut être le cas, parfois.  Enfin, si l’hypothèse est pertinente, un bilan de psychomotricité peut apporter des éléments sur les aptitudes fonctionnelles de l’enfant, notamment son organisation spatiale et matérielle. Avec ces éléments, les parents peuvent alors engager la discussion avec l’école et prendre leur décision collectivement. 

Quels sont les points de vigilance ?

Quelques points de vigilance sont à prendre en compte. Le premier est de se souvenir que, si l’enfant HPI présente une maturité cognitive et des aptitudes scolaires hors norme, il garde la maturité affective de son âge. Il peut suivre un enseignement supérieur mais il vivra toujours l’école avec ses yeux d’enfant. Il a donc besoin qu’on ne le fasse pas grandir trop vite sur ses ressentis et ses expériences affectives. 

Toutes les classes ne sont pas propices à l’accélération de scolarité

Autre point à garder à l’esprit, la structuration de la scolarité française ne permet pas d’envisager un saut de classe simple à tout moment. En effet, le saut de classe en cours d’année de Grande Section vers CP ou de CM2 vers 6ème présentent des difficultés d’organisation et d’adaptation souvent trop grandes en raison du changement d’école pour les équipes et pour l’enfant. 

A contrario, à cause de l’organisation en cycles, certaines années se révèlent plutôt favorables pour un saut de classe. Selon moi, un saut de classe peut plus facilement être envisagé en CE2 et la 5ème. Ce sont des années qui sont moins approfondies dans les apprentissages, surtout pour un enfant HPI. 

Que faire si l’école n’est pas d’accord ?

Pour de multiples raisons, l’établissement scolaire de l’enfant pourra être réticent à un saut de classe. La première objection peut être sur la maturité de l’enfant. Nous l’avons effectivement évoqué, il ou elle garde sa maturité affective, ce qui peut faire craindre une inadaptation sociale dans la nouvelle classe. Néanmoins, il relève de la vigilance des adultes de l’accompagner dans son apprentissage, pas de lui faire porter la responsabilité de s’adapter coûte que coûte. A noter que le saut de classe se passe souvent très bien de ce point de vue là. Les élèves plus grands ont tendance à faire attention à leur camarade plus jeune. 

réunion parents enfant HPI

En outre, le risque de décrochage scolaire est plus élevé pour un enfant qui s’ennuie dans sa classe plutôt qu’un enfant qui a peu de copains. L’établissement scolaire peut également considérer que le niveau en français ou en mathématiques constitue un obstacle pour le saut de classe. En effet, les enseignants sont particulièrement vigilants sur ces matières académiques par excellence. Les résultats scolaires antérieurs fourniront une bonne base d’évaluation pour le niveau acquis.  

L’écriture est-elle un frein au saut de classe ?

Durant mon accompagnement de saut de classe, j’ai souvent assisté à des craintes sur la rapidité d’écriture de l’enfant HPI. Oui, il ou elle est souvent réticente pour écrire mais cela ne signifie pas qu’il ne sait pas faire, pour autant. Interrogeons à l’oral pour vérifier.

Cependant, comme je l’ai mentionné, il peut être nécessaire de procéder à une détection auprès d’une orthophoniste pour lever les suspicions de trouble “dys”. Encore une fois, le Haut Potentiel peut masquer un trouble d’apprentissage. Si les parents sont convaincus qu’une accélération de scolarité ou un saut de classe sera bénéfique pour leur enfant HPI, il est nécessaire de provoquer la discussion avec l’école en évoquant les signaux d’alerte et en présentant les bilans effectués. 

Dans tous les cas, une réunion avec les personnels concernés sera nécessaire.  J’ai eu le plaisir d’accompagner des parents dans ces équipes éducatives pour apporter un éclairage objectif sur le fonctionnement cognitif du Haut Potentiel et sur les implications dans la scolarité de l’enfant concerné.

Et ensuite ?

Quand la décision est prise, le saut de classe se prépare : accueil dans la classe, attendus scolaires, rattrapage des cours. Malgré ses exceptionnelles aptitudes d’adaptation, on ne jette pas l’enfant HPI dans l’eau avec précipitation. Un entretien avec l’enseignant ou le professeur principal de la nouvelle classe me semble incontournable.  

Ensuite, il est nécessaire de planifier un bilan intermédiaire après quelques semaines pour faire le point sur la réussite du passage : relations sociales, rythmes de travail, engagement personnel de l’enfant dans les apprentissages, relations avec les nouveaux enseignants. Au minimum, un bilan téléphonique ou un rapide entretien permettra de vérifier que les indicateurs sont au vert.

Conclusion

Même s’il est souvent nécessaire, le saut de classe n’est pas toujours la bonne réponse quand l’enfant HPI montre des signes d’ennui ou de dégoût de l’école. L’accélération permet de se faire une idée de sa capacité à changer de niveau. La décision doit ensuite faire l’objet d’un véritable travail de réflexion pour les parents et l’école. On peut envisager un saut de classe à divers moments de la scolarité. 

Mais il faut garder à l’esprit la maturité affective de l’enfant qui, elle, n’est pas précoce. Les parents et les enseignants doivent donc porter une attention particulière sur ce point et se fixer des rendez-vous d’évaluation du saut de classe pour éviter que cette stratégie ne se retourne contre l’enfant lui-même et ne pose finalement pas plus de difficultés qu’au début.

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