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Quand l’école abîme les ados HPI

On parle souvent des résultats scolaires. Des bulletins et des performances. On peut également lire des études scientifiques qui confirment encore et encore que le profil HPI est protecteur et qu’il favorise la réussite aux examens. Mais on parle moins de ce que l’école fait à l’estime de soi chez les enfants et encore moins chez les adolescents HPI, supposés favorisés.

Chez eux, le problème ne saute pas aux yeux tout de suite. Ils peuvent continuer à apprendre, à rendre leurs devoirs, à avoir des notes correctes. Mais en coulisse, un lent désinvestissement s’installe. Et ce qui se désinvestit, ce n’est pas seulement l’école, c’est le lien à soi-même comme élève. Le rapport à sa valeur, d’abord scolaire, dans sa capacité à tenir sa place dans l’école, puis en miroir, c’est sa valeur en tant qu’humain qui diminue. Le droit de se sentir légitime dans son environnement général.

Quand comprendre n’empêche pas de souffrir

Un adolescent HPI peut saisir très tôt les règles implicites du jeu scolaire. Il sait ce qu’on attend. Il comprend les codes. Nous avons vu précédemment qu’il s’adapte généralement très bien et plutôt facilement aux attendus du système et de ses personnels.

Mais à force de comprendre sans être compris, de deviner sans être vu, de performer sans être reconnu pour ce qui fait sens pour lui, il se détache de lui-même. Il commence à penser que ce qu’il est ne suffit pas. Ou pire : que ce qu’il est réellement ne doit pas être montré.

Alors il joue un rôle. Celui de l’élève adapté, parfois brillant, parfois transparent. Il devient ce que le cadre attend. Et dans ce cadre, il apprend à ne plus se faire confiance. Ou alors il endosse les habits du trublion, à la fois pour attirer l’attention qu’il n’obtient pas avec ses résultats hors normes et pour se trouver un rôle parmi ses pairs. C’est parfois plus simple d’être craint que d’être admiré.

Estime de soi fragmentée, identité en retrait, le lot des HPI

Chez ces adolescents, le passage par l’école peut laisser des traces profondes :

  • Un doute sur leur propre intelligence, surtout si elle ne se conforme pas au modèle académique.
  • Une honte floue d’être “trop” : trop intense, trop curieux, trop rapide, trop sensible.
  • Une impossibilité à se définir autrement que par le regard des autres.
  • Une rupture progressive avec le plaisir d’apprendre, remplacé par la peur d’échouer, ou l’indifférence protectrice.
  • Une intériorisation du rejet : “si personne ne me voit vraiment, c’est peut-être que ce que je suis n’a pas d’intérêt.”

Ce n’est pas une question d’ego. C’est une lente disqualification intérieure. Elle ne fait pas de bruit. Mais elle abîme en profondeur. Des micro-coupures que la santé mentale encaisse, sans bruit

Les effets ne sont pas toujours spectaculaires, mais ils s’accumulent. Certains adolescents HPI développent une fatigue existentielle. Ils sont jeunes, mais usés. Pas par la charge de travail, mais par le sentiment de décalage constant, l’effort de traduction permanent, le camouflage émotionnel.

D’autres glissent vers des stratégies de retrait actif : ils donnent le minimum, avec distance. Ils ironisent, ou se murent dans une posture d’observateur lucide et détaché. Ce retrait n’est pas une pause. C’est une protection contre une atteinte identitaire.

D’autres encore finissent par rejeter l’école en bloc, mais sans jamais remettre en question le système. Ils remettent en question leur propre place dans ce système. Et c’est là que le risque se déplace : ce n’est plus l’école qui est jugée absurde, c’est soi qui devient inapte.

Conseils concrets pour amortir les effets psychiques sur les ados HPI

La remédiation ne passe pas par plus de stimulation ou d’aménagement. Elle commence par restaurer la confiance dans le lien entre savoir et soi. Voici quelques leviers, applicables dans les familles comme dans les structures éducatives :

1. Sortir du regard évaluatif

Créer des espaces où le jeune peut apprendre sans être jugé : projets personnels, apprentissages informels, découvertes autodirigées. Redonner à la curiosité sa fonction première : explorer, pas performer.

2. Nommer le décalage sans l’invalider

Plutôt que de nier la difficulté d’adaptation scolaire, la reconnaître comme un fait objectif. Lui donner du sens, sans en faire un drame. « Tu fonctionnes différemment, et ce système ne sait pas toujours s’ajuster. Ce n’est pas toi le problème. » Puis développer conjointement une posture qui permet de respecter l’identité de l’ado HPI et les obligations scolaires.

3. Valoriser la pensée divergente

Offrir des occasions de faire autrement : résoudre, structurer, expliquer à leur manière. Pas comme un privilège, mais comme une manière légitime d’exister intellectuellement.

4. Travailler sur le récit identitaire

Aider l’ado à reconstruire un récit cohérent de son parcours scolaire, où les zones de rupture sont vues comme des conflits de système, pas des échecs personnels. Ce travail peut se faire avec un coach, un adulte ressource ou un mentor HPI.

Ce qu’il faut retenir

Un adolescent HPI ne quitte pas l’école du jour au lendemain. Il s’éloigne d’abord de lui-même, dans sa manière d’apprendre, de penser, de ressentir. Il apprend à désinvestir pour ne pas se blesser.

À force de s’ajuster, il se perd. Et ce glissement altère profondément son équilibre intérieur, en particulier son estime de soi, c’est-à-dire la valeur qu’il se reconnaît intrinsèquement.

Réparer l’estime de soi ne consiste pas à lui redonner confiance en ses capacités mais à lui redonner confiance dans le fait qu’il a le droit d’exister intellectuellement tel qu’il est.

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