- Se méfier de la peur et de la colère
- Collecter des faits
- Favoriser les confrontations
- Soutenir les initiatives qui rassemblent
Si vous vous intéressez au harcèlement scolaire et que vous ne l’avez pas encore lu, je vous propose de consulter mon premier article sur les moyens d’améliorer sa prise en charge par l’école. Mais, le contexte cognitif et psycho-affectif est différent quand il s’agit d’un enfant HPI. Je complète donc mes propos par quelques conseils dans le cas de harcèlement d’un enfant HPI. Car vous pouvez aider l’école si votre enfant est harcelé.
Se méfier de la peur et de la colère
Quand on apprend que son enfant est victime de moqueries répétées, qu’il ou elle pleure abondamment de désespoir et que le risque de phobie scolaire se fait sentir, la première réaction d’un parent est d’abord la colère envers le responsable de cette situation puis envers l’école qui n’a pas su l’empêcher ou le détecter. La colère d’un parent d’enfant HPI est souvent très grande parce que le décalage, l’isolement social et les brimades à répétition sont le lot commun de la plupart d’entre eux. C’est certainement cette sensation d’injustice face à l’impuissance qu’il ou elle ressent pour son fils ou sa fille qui fait “dégoupiller” plus fort.
Ensuite la peur arrive. La peur qu’on ne réussisse pas à régler le conflit et à inverser le processus de rejet de l’école qui intervient parfois. La peur des représailles si votre enfant est amené à dénoncer ou que ça recommence avec un autre. Et ainsi de suite.
La colère des parents retarde la prise en charge
Ces réactions sont naturelles et normales. Elles doivent vous encourager à engager les actes nécessaires pour faire cesser le harcèlement. Nous savons cependant que « la colère est mauvaise conseillère ». Votre rôle de parent doit donc vous conduire à prendre quelques dispositions avant de vous précipiter rageusement dans le bureau de la direction de l’école.
J’ai souvent reçu dans mon bureau de CPE ou de principal adjoint des parents affolés parce que leur enfant venait d’avouer qu’elle ou il subissait des moqueries répétées. Pour être honnête, ce n’est pas simple de pouvoir mettre en route le processus de résolution du harcèlement face à une mère ou un père en colère. Croyez-moi, la peur et la colère ne motiveront pas l’école à être plus efficace. Le harcèlement est un fléau difficile à juguler dans les établissements scolaires. Pour de très nombreuses raisons. Un parent déterminé et collaboratif est beaucoup plus utile.
Collecter des faits
La justice n’est pas expéditive. Elle réclame des faits, j’insiste sur ce point. Le harcèlement peut parfois être une affaire d’évaluation de la situation et de manière de voir. Surtout du côté de l’école qui va devoir s’engager dans un processus codifié pouvant aboutir à une sanction lourde. Une fois la colère et la peur passées, parents, prenez le temps de faire raconter à votre enfant l’incident qui vous révolte. Puis les précédents et, si possible, les premiers signes de conflit avec le harceleur.
Un enfant à Haut Potentiel a de nombreuses informations à sa disposition. Il aura certainement perçu de nombreux ressentis. Il aura mémorisé beaucoup de détails et il pourra mobiliser son vocabulaire précis pour tout exprimer. Vous prendrez soin de noter les dates et les moments dans la journée : récréation, cantine, déplacement en journée, entrée ou sortie de classe ainsi que les lieux. Car le harceleur a ses endroits favoris où il se sent à la fois en public et en sécurité. Enfin, il est primordial de pouvoir citer des témoins, même s’ils seront réticents pour s’exprimer. Il faut briser leur silence. Ça sera le rôle de l’école.
Favoriser les confrontations avec médiateur
Il faut confronter le harceleur à sa victime. Pourquoi ? Parce qu’une victime ne doit pas le rester indéfiniment. Ce sont les excuses du coupable, ses regrets ou sa réprobation officielle qui permettent à la victime de retourner à son état de personne sociale. C’est le processus de résilience : retrouver un état antérieur après un choc. Pour l’enfant, ça signifie être capable de continuer son chemin en ayant dépassé l’épreuve du harcèlement. Bien entendu, cette confrontation ne s’improvise pas. Elle a lieu en présence d’un tiers formé à la résolution du harcèlement et à la médiation.
Pour exemple, j’ai organisé la participation à un concours d’affiche autour du harcèlement ou du respect, une séance d’écriture de slam à plusieurs ou encore une simple partie de Mastermind entre un harceleur et sa victime. Cela n’a été possible, à chaque fois, que parce que les parents de la victime ont compris que c’était le meilleur moyen de faire cesser le harcèlement.
L’école fera certainement le nécessaire, un protocole de résolution existe depuis de nombreuses années. Parce qu’il en a les capacités d’abstraction, il peut être intéressant, pour un enfant HPI, de remplacer les notions de “bien ou mal” par celles de “acceptable ou inacceptable” dans le vivre-ensemble. Autrement dit, de placer l’analyse de la situation non plus sur un plan moral mais sur un plan éthique. Pour que le harceleur prenne une véritable place de citoyen et que votre enfant approfondisse cet aspect de son existence sociale.
Soutenir les initiatives qui rassemblent
Enfin, on n’oubliera pas que le harceleur est aussi une personne qui doit retourner à un état compatible avec le vivre ensemble. A ce titre, au delà de la répression, il est essentiel d’organiser des moments qui rassemblent. Ainsi, il sera particulièrement bénéfique pour la victime et son harceleur de se retrouver en situation normalisée où chacun reprendra sa place de membre dans la communauté. Cela favorisera l’échange d’empathie et le partage de points communs par des activités collaboratives.
Les établissements scolaires véritablement engagés dans le traitement du harcèlement à l’école ont su développer une culture commune parmi les personnels et les élèves. Si ce n’est pas le cas de celui de votre enfant, il n’est jamais trop tard pour commencer à partager cette approche. Si le conflit sert à éduquer, n’oublions jamais que c’est la co-éducation qui aide l’enfant à bien grandir.